Droits et les devoirs des motocyclistes
Un débat adulte et instructif !
110 personnes ont participé à la rencontre initiée par le comité départemental motocycliste 37 vendredi 10 ma rs à la Maison des sports de Touraine. Première du genre, cette manifestation avait pour objet de prendre connaissance et de débattre des récentes dispositions ministérielles qui concernent au premier chef les loisirs verts motorisés. Autour de la table, sur l’invitation de Christian Bouquin, délégué départemental de la Fédération française de motocyclisme, Francis Rinaldi, de la Commission enduro de la ligue du Centre, Daniel Dufour, délégué départemental pour le quad, Laurent Vives de l’Association de Loisirs Verts, Mickaël Barbeau coordinateur de la FFMC (Fédération française des motards en colère), et Charles Péot, porte-parole du Codever (Collectif de défense des loisirs verts) et délégué pour la Région Centre. Dans les gradins de l’amphithéâtre, le service des sports du conseil général et la direction départementales de la jeunesse et des sports étaient également représentés.
Quinze ans de loi Lalonde
Christian Bouquin a rappelé en préambule la loi de 1991, dite loi Lalonde. Jusqu’en septembre dernier, cette loi qui interdit le hors piste et autorise la circulation des véhicules terrestres sur les chemins et les voies (privés ou publics) ouvertes à la circulation publique était simple, connue et admise du plus grand nombre. En l’absence de panneaux d’interdiction et de barrières, un chemin était considéré comme ouvert, tandis que les sentiers étaient réservés aux pédestres. Aucune confusion possible. Mais ce qui cause l’émoi des dizaines de milliers de pratiquants de loisirs verts motorisés en France, quad moto et 4x4, depuis l’automne dernier, c’est la publication d’une circulaire émanant du ministère de l’Écologie et du Développement durable, destinée à rappeler cette loi vieille de 15 ans. Ce texte, s’appuyant sur une jurisprudence récente, introduit une notion nouvelle : celle de la “carrossabilité”. Pour être présumée ouverte à la circulation “une voie doit être manifestement praticable par un véhicule de tourisme non spécialement adapté au tout terrain”. En résumé : là où une Clio ne peut passer, les véhicules de tout-terrain ne doivent pas s’engager… Ubuesque ! Christian Bouquin a toutefois rappelé la complexité et le flou qui entoure ces notions juridiques : “La carrossabilité ne s’applique qu’aux voies privées et pas aux chemins ruraux par exemple, qui restent ouverts même s’ils ne sont pas carrossables. Et la présence de panneaux et ou barrières n’est plus nécessaire pour indiquer la fermeture du chemin.” Difficile de s’y retrouver ! Cette circulaire, décidée sans aucune concertation, a aussitôt provoqué un tollé. La FFM, organisme pourtant délégataire du ministère de la jeunesse et des sports, et le Codever ont d’ailleurs déposé un recours en annulation devant le Conseil d’État. Mais il faudra attendre encore de longs mois avant d’en connaître le résultat.
Le danger des PDIRM
En attendant, il n’est plus possible de randonner sereinement. Charles Péot a ainsi mis en garde le public sur les risques aujourd’hui encourus : “les cas de verbalisations abusives se sont multipliés. On a assisté dans certaines régions à de véritables battues aux motorisés. Il faut contester ces PV mais de préférence en faisant appel à un avocat !” Et de rappeler que les procès verbaux peuvent aller de 135 à 1500 euros selon les cas. Le repésentant du Codever a également expliqué que le ministère de l’Écologie souhaitait mettre en place des PDIRM (plan départementaux d’itinéraire de randonnée motorisée) prévus par la loi Lalonde mais jamais instaurés par les conseils généraux. “Les PDIRM sont dangeureux car destinés à parquer nos loisirs sur des itinéraires précis et sans intérêt pour la discipline, dont nous n’aurons plus le droit de sortir. À l’instar de ce qui s’est passé cet hiver avec la raquette à la montagne, on peut très bien imaginer que nos randonnées seront à l’avenir soumises à contribution ! Mais après nous, les cavaliers, les VTT mais aussi les pédestres seront concernés” a-t-il affirmé. “Au lieu de construire une société de partage, de respect et de tolérance, on se dirige vers tout autre chose, où l’on va diviser, cloisonner, interdire. Ce sont deux conceptions très différentes de nos campagnes, je dirais même que que c’est presque une question de choix de société” a analysé Lauvent Vives. Dans la salle, de nombreuses questions ont fusé, preuve de l’émotion suscitée par ces directives. “Mais alors, pour rouler, on fait comment maintenant ?” a d’emblée interroger un participant. “Aujourd’hui la circulaire Olin n’a pas force de loi mais sur le terrain on peut très bien avoir affaire à des fonctionnaires zélés qui verbaliseront… Bien sûr,il y a la possiblité d’étudier le cadastre de toutes les commnues traversées et de vérifier le statut des chemins… Sachant qu’en quelques mois, un chemin rural peut avoir été vendu par la commune par exemple…” Un vrai casse-tête ! La situation est incompréhensible pour beaucoup qui ne voient pas où est le problème.
Une même passion pour la campagne
Tout le monde s’est accordé à reconnaître que la situation en Touraine n’est pas encore problématique. Hormis quelques sites précis (Natura 2000, levées de la Loire, camp militaire etc.), que Christian Bouquin a listé, randonner en Indre-et-Loire est, jusqu’à preuve du contraire, encore possible. D’autant que les relations avec les autres usagers des chemins semblent la plupart du temps cordiales, à en croire les nombreux témoignages. Les randonneurs, qu’ils soient à pied, à vélo, à cheval, à moto, en quad ou 4x4 ont théoriquement en commun la passion de la nature… De même, l’argument de la “surfréquentation des chemins” souvent avancé par les détracteurs de la randonnée motorisée a été contesté. “Des études ont démontré, que l’on rencontre en moyenne un autre randonneur tous les trente kilomètres seulement !” a précisé Charles Péot. “Tout le monde dit que ça se passe bien entre usagers, mais pourquoi les randonneurs pédestres font-ils circuler une pétition contre nous ?” s’est étonné un participant. “On ne nous reproche pas de faire du bruit ou de nous mal conduire, je crois qu’on nous reproche simplement d’avoir des véhicules à moteur !” a de son côté renchéri un autre pratiquant, tandis que d’autres soulignaient la nécessité d’éduquer les pratiquants de loisirs motorisés à un code de bonne conduite. Des réflexions qui témoignent du désarroi de ces passionnés, qui ne comprennent pas pourquoi ils sont devenus en quelques mois de vulgaires “bandits de grands chemins” alors qu’ils ont le sentiment de tout simplement pratiquer un loisir dans le plus grand respect des autres usagers et de la nature. En résumé, un débat très instructif, dans une ambiance conviviale qui a eu le mérite de pointer du doigt les incohérences d’un texte autoritaire et répressif. La circulaire Olin a déjà provoqué une manifestation nationale en novembre dernier qui avait rassemblé 8500 personnes. Elle va conduire une nouvelle fois les randonneurs motorisés dans la rue : ils manifesteront leur mécontentement ce samedi 18 mars à Orléans, préfecture régionale.
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